Loïc Guiot : portrait d’un jeune agriculteur : une passion de terre en fils

« À la ferme de l’établissement de Sivry-Rance, l’agriculture reste une affaire de famille. Rencontre avec Loïc Guiot, la 3ième génération, qui dans un secteur où les normes sont de plus en plus strictes et les crises assez fréquentes, a bien compris qu’il ne fallait plus mettre ses œufs dans le même panier ! »
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Quel est votre parcours scolaire ?
J’ai un baccalauréat en agronomie de la Haute école Provinciale de Ciney. À l’occasion du 75ième anniversaire de l’école technique provinciale d’agriculture, et en lien avec mon travail de fin d’études, j’ai eu la chance de confectionner deux fromages. Fort de cette expérience, j’ai travaillé pendant 4 ans à la fromagerie chimacienne. Ensuite, j’ai décidé de m’associer avec mes parents pour reprendre l’exploitation de la ferme familiale.

Que produisez-vous ?
Une large variété de produits laitiers. Ceux-ci sont d’ailleurs accessibles dans le magasin à la ferme : beurre, lait entier et écrémé, fromage à pâte pressée, crème fraîche, fromage à pâte molle, fromage frais, yaourts, glaces, etc.
Pour la production, on capitalise sur la race bovine Rouge des Flandres croisée avec la Fleckvieh allemande, plus rustique que l’Holstein noire. Cela fournit un lait particulièrement riche en matières grasses et protéines. Comme on dit, une bonne vache fera du bon lait ;-) Toutefois, et même si la génétique de l’animal a son importance, d’autres facteurs influent sur la qualité du lait : son alimentation, sa santé et le travail de l’éleveur.
En parallèle, la plupart de nos produits sont commercialisés au Spar de Sivry et dans les Delhaize de la région : Rance, Chimay et Couvin. Mais aussi, et pour ne citer que celles-là, à la boucherie des Barrages à Boussu-lez-Walcourt et la boulangerie la Fleureuse à Sautin pour le beurre, ou encore la boucherie Lefèvre à Thuin pour les fromages et yaourts.

La particularité de votre entreprise familiale est que trois générations y ont travaillé. Quelle est votre nouvelle perspective du métier en tant que nouvelle génération ?
En termes de produits, j’ai ajouté les fromages, les yaourts et les glaces. Depuis que j’ai repris la ferme, on emploie désormais 4 personnes (dont 1 en immersion professionnelle) et 2 stagiaires. Ces personnes s’occupent du conditionnement, du magasin, etc. Indépendamment du fait de pouvoir déléguer, c’est assez gratifiant de pouvoir contribuer à l’économie locale ;-)
On essaie également d’aller vers une agriculture connectée qui, outre le gain de temps, contribue au bien-être animal. Par exemple, nous avons investi dans des colliers de détection de chaleurs. Au-delà de l’identification plus précoce des chaleurs, cela nous permet un confort de travail, une réduction de main d’œuvre et une meilleure surveillance de la santé du troupeau. Le but est vraiment de maximiser notre production pour stabiliser nos revenus.

Est-ce que les liens familiaux offrent un avantage dans la gestion d’une ferme ?
De manière générale, leurs connaissances du terrain m’aident énormément notamment pour les installations agricoles. Et le côté vraiment positif, c’est qu’ils me laissent carte blanche pour la gestion. Ils me font confiance et ne me blâment pas à la moindre erreur.
Là où on a senti un décalage intergénérationnel, c’est au niveau de la technologie : mon papa a eu un peu de mal à s’y mettre au début mais ici c’est une affaire qui roule ;-)
À quoi ressemble une journée de travail à la ferme ?
Ma journée commence à 6h du matin à l’atelier de transformation pour les produits laitiers. Ensuite, petite pause déjeuner en famille. Début d’après-midi, j’enchaîne les tâches jusque 20h/20h30 en extérieur pour distribuer la nourriture, m’occuper des prairies, etc.
Mais ce n’est qu’une partie de la profession car il y a aussi tout l’aspect administratif, le contact client au magasin, les livraisons, la surveillance des troupeaux, les soins aux vaches, etc. C’est vraiment un métier à part entière où l’on porte plusieurs casquettes.

Sur les trente dernières années, la population des fermes s'est réduite de plus de la moitié en Wallonie. La diversification des activités agricoles est considérée comme LA solution. Qu’en pensez-vous ?
Dans un contexte économique, financier, et même climatologique assez incertain, la diversification permet de stabiliser ses revenus en se lançant, par exemple, dans des circuits courts, des activités pédagogiques, ou encore en proposant un logement à la ferme.
Lors de la crise laitière, je me souviens que mon papa était content de pouvoir vendre ses vaches aux boucheries locales. Ces différentes sources de revenus permettent de faire face aux crises. L’essentiel est de trouver le type de diversification qui va de pair avec sa situation géographique, son potentiel de commercialisation et surtout son envie d’entreprendre !
Comment abordez-vous les innovations et les nouvelles technologies ?
J’essaie de les introduire graduellement au sein de l’exploitation familiale. Par exemple, il y a de cela quelques semaines, nous avons investi dans un détecteur de vêlage. Ce système permet de détecter les signes précurseurs d’un vêlage imminent. Avant, papa se levait 2/3 fois pendant la nuit ! Grâce à cette avancée technologique, on s’économise car on a plus à devoir s’éveiller à intervalle régulier pour surveiller. On économise énormément de temps et d’efforts.

Quels sont vos objectifs pour les années à venir ?
Avec nos installations agricoles et investissements technologiques, je souhaiterais mettre en place une organisation permettant de concilier davantage vie professionnelle et vie privée. Vous savez, les animaux, c’est 7 jours/7 et toute l’année. En effet, et même si j’adore mon métier, j’aimerais prendre des pauses régulières pour pouvoir me ressourcer.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes souhaitant exercer ce métier ?
S’entourer d’un réseau solide, élaborer un plan de société structuré, se renseigner sur l’emplacement de l’exploitation déterminant le type de sol, et le plus important être motivé et conscient des exigences du métier pour maintenir sa motivation sur le long terme.
J’en profite d’ailleurs pour remercier mon entourage (famille, amis, employés, entreprises partenaires) pour leur soutien et bienveillance dans la gestion de l’exploitation familiale ;-)
